JULIA TROUILLOT
 

JULIA TROUILLOT



LUMPEN DRAWINGS 2018
Installation de deux chassis, dessin sur toiles ajourées

Si elle est vouée à disparaître, la culture ouvrière est pourtant partout autour de moi : sous les toits à sheds, derrière les murs de briques en ruines, dans le quotidien. Devant ma fenêtre, les trains de marchandises trimballent des bagnoles sur leurs wagons bleus, encore et encore. Contemplation du « déjà-plus », fascination produite par le geste répété, par le réveil aux aurores, par les odeurs d’huile, par le boucan de l’usine. J’observe, je me nourris des matériaux de l’industrie, de ses méthodes de production, mais aussi de ses vexations et de la résistance accrue de l’homme à celles-ci.
Ma démarche est ancrée dans une perception personnelle de la culture populaire, celle que je considère comme étant mienne, que l’on peut également appeler culture ouvrière, et de ses possibles réappropriations. Entre empathie et critique, je questionne des formes de production qui mettent en exergue l’enjeu de l’exposition, de l’expérience de travail, mais aussi de la collection et du positionnement social et politique.




juliatrouillot.com
 

La friche, espace délaissé, jalonne le paysage mulhousien. Celle-ci en particulier, vidée de des bâtiments, rasée, mise à nue, donne envie de revenir l’habiter, la visiter, en changer la fonction. Pour ce projet, je souhaite installer, sur les tertres de gravats et au sol, de grands dessins sur toile ( 2 × 3 m environ ) montés sur châssis à l’image des enseignes publicitaires en bord de route, inspirés des plans techniques de machines industrielles utilisées autrefois dans cette filature. Le bruit ici ne résonne plus, mais il s’agit de porter l’attention sur ce lieu, de faire résonner sa mémoire désormais.

Les villes industrielles et post industrielles m’ont toujours interrogée : depuis quelques années, mon travail se nourrit de l’histoire industrielle de Mulhouse, la petite Manchester française. J’aime à questionner, à travers différentes techniques (moulages, installations, sculptures, sérigraphies) le rapport de l’homme à son travail, à la machine, et la résistance qu’il développe, au quotidien. Ces lieux que sont les friches, deviennent des non-lieux, alors qu’ils étaient autrefois un centre névralgique, dans la ville. Que serait Mulhouse, sans sa brique rouge ? J’ai envie de remettre, par un moyen pictural et technique, la machine et l’homme qui s’en sert, à la vue de tous. Si les friches sont mémoire, elles sont également poésie, espace à réinventer et à se réapproprier.