C’est un étrange voyage auquel nous convie le photographe espagnol Pablo Castilla avec sa série Altiplano exposée sur les berges de l’Ill à Mulhouse.
Par Dominique BANNWARTH

Altiplano. Photo Pablo Castilla
Lauréat de l’Open Call de la Biennale de la Photographie de Mulhouse et de Mulhouse Art Contemporain, le photographe espagnol Pablo Castilla propose une série intitulée Altiplano, présentée jusqu’en juillet 2026 sur les berges de l’Ill à Mulhouse.
Les images de Castilla résonnent parfaitement avec le thème de la prochaine BPM 2026, à savoir « Sédimentation(s) ».

Altiplano Pablo Castilla
Depuis 2015, Pablo Castilla explore ce territoire de l’Altiplano, l’une des zones les moins peuplées du sud de l’Espagne, une vaste région désertique, rocheuse et aride, « attiré par un paysage qui cache autant de choses qu’il en révèle à sa surface ».
La terre, les grottes, les béances dans le sol, l’horizon ocre, composent un paysage hors du temps, et recèlent aux yeux du photographe une dimension extra-ordinaire, un monde visible qui appelle à la découverte d’un monde insoupçonné.
D’où cette interrogation : « Comment la photographie peut-elle rendre compte de ce qui est invisible ou disparu ? »

Altiplano Pablo Castilla
... et s'élever au-dessus d'un paysage entier comme si on volait au-dessus de lui / chercher le trou, l'entrée qui vous appelle / se tenir là, être près de l'entrée, la voir / s'ouvrir totalement à la perception, à chaque impression / est-il sombre ? est-il jour ? y a-t-il de l'herbe ? y a-t-il de la pierre ? quel genre d'oiseau ? chaque bruit, le vent / qu'est-ce que cela fait d'être là, près de l'entrée ? / Et puis entrez, seulement si vous le voulez.
Dominique, Instructions pour un voyage chamanique

Altiplano Pablo Castilla
En déambulant au fil du parcours à la découverte de la vingtaine d’images installées sur les panneaux des bord de la rivière, on pénètre insensiblement dans cet univers singulier, fait d’étrangeté, de mystère mais aussi d’une extrême beauté, primaire, intacte, éternelle.
« Dès le début, explique Pablo Castillan, j’ai été attiré par le potentiel poétique de l’utilisation des grottes et des fissures dans le paysage comme des portes d’entrée vers un autre monde, une sorte de trou de lapin. Je voulais voyager à la fois au-dessus et en dessous de la surface de ce territoire. »

Altiplano Pablo Castilla
Il y a quelque chose de la caverne platonicienne qui émane de ces images, comme un regard sur le monde qui inverse le cours du temps, qui plonge les êtres dans une autre réalité, enfouie, secrète mais tellement présente.

Altiplano Pablo Castilla
A cette sorte d’hors champs suggéré par la captation du paysage et de la nature austère de l’Altiplano, répond la présence très réelle des humains dans leur rapport vernaculaire à cette terre.
Femme, homme, enfant, animaux s’insèrent néanmoins dans cet univers désertique, comme des épiphanies vernaculaires et contemporaines.
Ce sont des acteurs qui animent ce paysage et ses étrangetés, présences rationnelles et bien réelles dans ce théâtre naturel aux coulisses mystérieuses.

Altiplano Pablo Castilla
Happé par ce monde sédimenté par le temps, Pablo Castilla a fait appel à un chaman pour essayer d’en pénétrer les strates.

Altiplano Pablo Castilla (détail)
« Les visions que j’ai eues au cours de mes voyages chamaniques ont façonné la façon dont j’ai vécu le paysage d’en haut, tout comme mes rencontres avec le monde physique réel, se sont infiltrées dans mon subconscient au cours des séances avec le chaman (…) Je voulais que le monde d’en haut et le monde d’en bas entrent en dialogue… « , confie le photographe.
Altiplano, parcours photographique quai des Cigognes, berges de l’Ill à Mulhouse, visible jusqu’en juillet 2026.
Accès côté ville par l’arrière du stade de l’Ill, là partir du parking devant le camping par le pont chinois, le parking de la patinoire vers le minigolf ou le pont de la rue de l’Ill côté Brunstatt, derrière le stade nautique.